Diabète et grossesse

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Diabète et grossesse : l’essentiel sur le diabète gestationnel

La grossesse est un moment particulièrement bien surveillé par les médecins et les sages-femmes, notamment pour détecter et traiter à temps un éventuel problème, comme un diabète durant la grossesse, appelé diabète gestationnel (DG).

La grossesse entraîne des bouleversements dans l’organisme de la femme particulièrement sur le plan hormonal. Ainsi, la tolérance au sucre est modifiée et quelques femmes présentent une glycémie (taux de sucre dans le sang) qui dépasse le seuil normal, témoignant d’un diabète durant la grossesse (diabète gestationnel).

On estime que ce problème touche environ 8 % des femmes enceintes. Il survient le plus souvent au deuxième trimestre de la grossesse, et disparaît normalement après l’accouchement.

De nouvelles recommandations de dépistage diffusées en 2010 proposent un dépistage en fonction de la présence de facteurs de risque. Dans ce cas, il est recommandé que le médecin réalise ce dépistage par une prise de sang (glycémie à jeun) dès la première consultation de grossesse.

En l’absence d’anomalie, un dépistage du diabète gestationnel est préconisé entre 24 et 28 semaines d’aménorrhée (SA).

Qu’est-ce que le diabète gestationnel exactement ? Quels sont les causes, les symptômes et les éventuelles complications ? Et surtout : comment traiter le diabète gestationnel (DG) ? Zoom sur cette maladie qui peut se manifester pendant la grossesse.

Grossesse et diabète gestationnel : les causes

Les causes du diabète gestationnel sont multiples et assez complexes

Durant les 2e et 3e trimestres de la grossesse, les besoins en insuline de la femme enceinte sont de 2 à 3 fois plus importants qu’en temps normal.

Cela s’expliquerait par l’augmentation progressive, durant la grossesse, de la production d’hormones « anti-insuline » (par exemple, les hormones placentaires, le cortisol et les hormones de croissance), qui réduisent les effets de l’insuline sur l’organisme. Elles sont essentielles au bon déroulement d’une grossesse, donc à la santé du fœtus et de la mère.

Pour compenser cette résistance à l’insuline, le corps stimule le pancréas pour produire davantage d’insuline. Cependant, chez certaines femmes le pancréas a des difficultés à produire ce surplus, s’installe alors un taux de sucre trop élevé dans le sang : l’hyperglycémie.

Les symptômes

Contrairement à un diabète installé (diabète de type 1 ou diabète de type 2), le diabète gestationnel est souvent asymptomatique et passe généralement complètement inaperçu.

Parfois, en cas de diabète gestationnel sévère il peut se manifester par des symptômes comme :

  • Augmentation de la soif,
  • Augmentation de la miction,
  • Augmentation de l’appétit,
  • Vision trouble.

Cependant, la grossesse peut elle-même être la cause de ces symptômes et sensations et cela ne signifie donc pas toujours qu’il existe un DG ; il est donc important d’en discuter avec le médecin qui suit la grossesse.

Le diagnostic

Le dépistage du diabète gestationnel (DG) est proposé pour les femmes qui présentent l’un des facteurs de risques suivants :

  • surpoids ou obésité (Indice de Masse Corporelle > 25 kg/m2),
  • âge > 35 ans,
  • antécédents familiaux de diabète au 1er degré (parents, frères et soeurs),
  • antécédent personnel de diabète gestationnel lors d’une précédente grossesse ou d’un bébé de poids supérieur à 4 kg (dit « macrosome »).

Chez les femmes à risque, il est donc recommandé de réaliser une glycémie à jeun au laboratoire après 12 heures de jeûne, avant la grossesse ou au cours de la première consultation prénatale lorsque la grossesse est programmée.

  • Avant la grossesse, cet examen est destiné à dépister un diabète de type 2 préexistant qui est révélé si la glycémie est > 1,26 g/l.
  • En cas de grossesse débutée, il existe un diabète gestationnel si la glycémie est > 0,92 g/l.

Si tout est normal, un deuxième test sanguin sera effectué entre les 24ème et 28ème semaines d’aménorrhée (2ème trimestre de grossesse). On effectue cette fois-ci une hyperglycémie provoquée (« HGPO ») au laboratoire : prise de sang réalisée à jeun, puis 1h et 2h après une prise de 75 g de glucose. Les valeurs diagnostiques d’un diabète gestationnel sont respectivement : à jeun> 0,92 g/l, 1h>1,80 g/l et 2h> 1,53 g/l.

Ce test peut être proposé « en rattrapage », à 32-34 semaines d’aménorrhée, chez les femmes qui ne sont pas à risque, mais chez lesquelles on détecte des anomalies à la 3ème échographie comme un hydramnios (liquide amniotique en excès) ou une macrosomie (poids du fœtus > 97ème percentile).

Grossesse et diabète gestationnel : les complications possibles

Les complications d’un diabète gestationnel existent, aussi bien du côté du bébé que tu côté de la mère.

Pour le bébé

Survenant le plus souvent au 2eme trimestre, le diabète gestationnel n’entraîne pas de risque de malformations fœtales car la glycémie est normale au moment de l’organogénèse (période de formation des organes). Cependant, toutes les modifications des éléments du sang chez la mère se retrouvent chez le bébé.

Ainsi, si la maman a trop de sucre dans son sang, il y aura trop de sucre dans le sang du bébé qui risque alors de devenir trop gros.

La principale complication pour l’enfant est donc la macrosomie (poids de naissance >4kg) qui s’accompagne d’un risque accru de traumatisme pour l’enfant par dystocie des épaules à la naissance (absence d’engagement des épaules après expulsion de la tête).

Le médecin peut donc être amené à proposer un accouchement par césarienne à but préventif lorsque l’échographie de la 37ème ou 38ème semaine révèle un bébé de poids > 4,250kg.

A plus long terme, les enfants pourraient présenter un risque augmenté de surpoids ou d’obésité et de diabète de type 2.

Les risques de complications sont donc divers, et peuvent être graves notamment pour le bébé si le diabète n’est pas correctement pris en charge.

Pour la mère

Chez la maman, le risque de pré-éclampsie (tension artérielle élevée et albumine dans les urines) reste modéré si le régime est bien observé.

En revanche, il est important de limiter la prise de poids pendant la grossesse car les risques de complications sont majorés quand la mère est en surpoids ou obésité et le risque d’accouchement par césarienne est plus fréquent chez ces mères qui n’ont pas pu stabiliser leur diabète.

Grossesse et diabète gestationnel : les traitements

Le traitement du diabète gestationnel repose d’abord sur les règles hygiéno- diététiques : alimentation personnalisée et activité physique douce.

1 – L’alimentation :

Il n’est pas question de vous priver, l’intérêt ici n’étant pas de mincir, mais de limiter la prise de poids. Privilégiez les aliments à faible indice glycémique (pain complet, légumes et légumineuses, riz complet, fruits, céréales non sucrées, laitages) et éliminez les sucres rapides (sodas, gâteaux, céréales sucrées, jus de fruits, etc.).

Pour assimiler ces apports sans augmenter la glycémie, vous devrez manger en petites quantités et plus souvent : trois repas principaux et deux à trois collations, avec un minimum de deux heures entre chaque.

Si après 7 à 10 jours de ce régime, vous êtes toujours au-dessus de vos valeurs de référence de glycémie, il sera toujours temps de rééquilibrer votre régime ou d’envisager un traitement par insuline.

2 – Des exercices doux :

En l’absence de contre-indication médicale, une activité physique douce est recommandée :

  • la marche, 30 minutes d’affilée par jour, 5 jours sur 7.
  • Pour celles qui le peuvent, il y a aussi la natation,
  • le vélo d’appartement,
  • le tapis de course… Le but étant de brûler du sucre !

3 – Une auto-surveillance de la glycémie :

C’est un autre point clé de votre régime. Grâce à la prescription d’un lecteur de glycémie, vous devez contrôler votre taux de sucre six fois par jour, avant et après chaque repas. Chaque valeur est consignée dans un carnet, que vous présentez à votre médecin lors de chaque consultation.

4 – Le traitement par insuline :

Une femme sur cinq souffrant d’un diabète gestationnel, ne parvient pas à réguler sa glycémie par les seules règles hygiéno-diététiques. Vous serez alors peut-être obligée d’en passer par l’insulinothérapie, c’est-à-dire de vous faire des injections quotidiennes d’insuline : de une à quatre par jour, selon votre profil glycémique, à l’aide d’un stylo pré-rempli.

Pour évaluer votre besoin, il vous faudra apprendre à lire votre glycémie, grâce au lecteur de glycémie, aux moments clés de la journée (avant et après les repas). Rassurez-vous, les bons gestes à acquérir vous seront enseignés à l’hôpital. Sauf cas rares, ce traitement est stoppé dès l’accouchement.

Grossesse et diabète gestationnel : après l’accouchement

Si la mère a souffert d’un diabète durant sa grossesse, après l’accouchement, quelle doit être la surveillance ? A la fois pour la mère et pour le bébé, bien sûr.

1 – Pour le bébé.

En cas de diabète gestationnel, il n’y a pas de risque de diabète pour votre enfant. En revanche, dans certains cas (bébé trop gros ou trop petit, traitement par insuline), votre bébé peut se trouver en hypoglycémie dès que le cordon ombilical est coupé, nécessitant une surveillance médicale régulière, et d’apporter un traitement adéquat au nouveau-né, dans les heures et les jours suivant la naissance.

2 – Pour la mère.

La glycémie redevient normale dès la naissance du bébé. Toutefois, le risque de développer un diabète de type 2 au cours d’une future grossesse, ou plus tard dans votre vie, est plus élevé.
Il est par conséquent important de continuer à adapter votre alimentation, de contrôler votre poids et de faire de l’exercice. Le suivi glycémique chez le médecin reste également primordial : glycémie à jeun dans les deux mois après l’accouchement ; si tout est normal, un contrôle du taux de sucre dans le sang doit être réalisé à un an et à trois ans, et avant toute nouvelle grossesse.

3 – La contraception.

les femmes qui ont eu un risque associé à leur diabète gestationnel (obésité, hypertension artérielle…) devront prendre une contraception à base de progestatif.

Grossesse et diabète gestationnel : les conseils du médecin spécialiste

Les conseils du Dr Jacques Lepercq, médecin spécialiste, gynécologue obstétricien à la Maternité Port-Royal, Paris.

Quels sont vos conseils concernant les règles hygiéno-diététiques ?

Il est important de rappeler que le régime n’est pas identique pour toutes les femmes et que les médecins, les diététiciens doivent le personnaliser. Il doit être adapté quantitativement et qualitativement, en fonction de l’IMC (poids) et des habitudes alimentaires. Ce n’est qu’à cette condition qu’on a des chances d’avoir une bonne observance. D’un autre côté, il faut être moins permissif sur la prise de poids. Car, on le sait, le surpoids et l’obésité sont des facteurs aggravants de complications. Un kilo en plus, ça va, mais on ne peut pas laisser filer le poids jusqu’à 30 kilos.

Quel est l’intérêt du suivi médical après la grossesse ?

On estime que le diabète gestationnel est une sorte de signal d’alerte pour un possible futur développement d’un diabète de type 2. Le risque persiste pendant 25 à 30 ans après la survenue d’un diabète gestationnel. Comme on ne peut pas lutter contre l’âge ou nos gènes de prédisposition, il faut continuer à adapter son régime alimentaire, surveiller son poids, faire de l’exercice et contrôler régulièrement ses glycémies.

Faut-il parler de diabète de type 2 dans le diabète gestationnel ?

C’est même le mot clé ! Il faut distinguer le diabète gestationnel, qui est une simple anomalie de la glycémie au cours de la grossesse, de celui qui était déjà là, avant la conception, c’est-à-dire un diabète de type 2. Quand les complications surviennent, c’est généralement chez les femmes qui ont ce diabète – elles représentent 15 % des dépistages de diabète gestationnel – d’où l’importance de les détecter en tout début de grossesse, et au mieux, avant la conception, par une simple glycémie à jeun. Le dépistage du diabète gestationnel est même l’un des moyens de dépister le diabète de type 2 méconnu par les patientes.

Grossesse et diabète gestationnel : le témoignage d’une femme enciente

Témoignage d’Anne, 30 ans. Au sixième mois de grossesse, on lui découvre un diabète gestationnel…

Comment avez-vous vécu la situation à l’annonce du diagnostic ?

J’ai un antécédent familial. Ma mère est diabétique. Cela dit, j’ai été surprise quand on m’a annoncé ce diabète au sixième mois – ma glycémie était normale auparavant. Ma soeur, qui a eu deux grossesses, n’a jamais eu de diabète gestationnel et je pensais que ce serait pareil pour moi. Mais je n’ai jamais été inquiète. A l’hôpital, un diabétologue et une diététicienne ont répondu à toutes nos questions au cours d’une réunion d’information collective. Nous avons même eu un repas type, le midi, pour nous rendre compte de ce que nous devrions manger.

Comment se sont concrétisées vos nouvelles règles de vie ?

Pour l’alimentation, ça n’a pas été difficile. C’était assez proche de ce que je mangeais, sauf les proportions qui étaient plus importantes. En travaillant en horaires décalés, je mangeais peu et n’importe quand. Là, j’ai été obligée de respecter des distances horaires fixes entre chaque repas et collation (trois repas et trois collations par jour). Et puis, avaler 200 grammes de féculents, deux fois par jour, avec des légumes en plus, c’était beaucoup pour moi ! Pour le sport, j’ai marché au début, mais je suis au repos complet maintenant. Mon placenta se calcifie, et je fais de l’hypertension.

Au niveau glycémique, où en êtes-vous ?

Je suis sous insulinothérapie, parce que mes résultats de glycémie à jeun étaient trop élevés dès le début. Après l’accouchement, si tout redevient normal, j’arrête l’insuline. Mais je devrai faire attention à ne pas prendre de poids dès l’arrêt de l’insuline, au risque de déclencher un diabète. Je sais que je suis à risque pour plus tard, notamment pour une future grossesse.

Grossesse et diabète gestationnel : Sources et notes

– Lepercq J., Conduite à tenir devant un diabète gestationnel. Revue du praticien. Gynécologie et obstétrique, 2006, n° 108, pp 23-8.

– Langer O. Gestational diabetes : the consequences of no treating, Am J Obstet. Gynecol., 2004, 192, 989-97.

– Le diabète gestationnel en 2011, étude internationale, Anne Vambergue. Soins, n°753, mars 2011.

– Le grand livre de ma grossesse, Collège National des Gynécologues-Obstétriciens Français, Eyrolles, édition 2015/16.

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