Comme son nom le suggère : du liquide (œdème) envahit brutalement (aigu) les alvéoles pulmonaires (poumon). L’Œdème Aigu du Poumon (OAP) représente 1 % des motifs de passage aux urgences en France. Il s’agit de la complication la plus fréquente de l’insuffisance cardiaque gauche et sa survenue rapide en fait sa gravité.
Les causes
La cause de l’OAP est une dysfonction brutale cœur. Le cœur est une pompe qui récupère le sang dans les veines et le réinjecte dans l’aorte pour aller alimenter l’organisme. Le mauvais fonctionnement de cette pompe entraîne une accumulation de liquide en amont (ici : les veines pulmonaires) et ainsi une augmentation de pression dans les veines puis les capillaires pulmonaires. Cette forte pression induit une fuite de plasma (liquide) à travers la paroi des vaisseaux qui se retrouve ainsi dans les alvéoles pulmonaires. Les poumons sont donc remplis de liquide et non d’air : ils ne jouent plus leur rôle d’oxygénation.
Structure et fonction des poumons et des alvéoles :
L’air inhalé s’écoule dans la trachée. La trachée s’étend du larynx aux extrémités des bronches situées dans le système bronchique qui se compose de grands et petits tubes (bronches, bronchioles), à travers lesquels l’air respirable atteint les quelques 300 millions d’alvéoles. Les alvéoles sont entourées de fins vaisseaux sanguins : les capillaires pulmonaires.
Entre les alvéoles et les vaisseaux sanguins se produit l’échange gazeux : les alvéoles remplies d’air alimentent le sang des capillaires en oxygène. En même temps, le sang libère du dioxyde de carbone dans les alvéoles, qui le transportent hors de l’organisme par l’intermédiaire de l’air respiré.
Cette dysfonction peut survenir alors que le cœur est « sain » avec une cause réversible qui gène son fonctionnement : par exemple des toxiques, une tachycardie, une transfusion massive, une poussée de tension (hypertension)…
Mais la plupart du temps, l’Œdème Aigu du Poumon survient alors qu’il existe une maladie cardiaque (connue ou méconnue). Cela peut être à la suite d’un infarctus, d’un problème de valve, d’une cause familiale…
La fonction cardiaque est altérée (insuffisance cardiaque), le cœur remplit son rôle tant bien que mal et tout est à l’équilibre. Mais la moindre perturbation peut déséquilibrer ce système fragile ce qui provoquerait une décompensation cardiaque.
A retenir : On parle de décompensation cardiaque lorsque l’insuffisance cardiaque se complique. L’organisme ne parvenant plus à “compenser” les défaillances dues à l’insuffisance cardiaque.
Cela peut être lié à :
- une surcharge de travail pour le cœur : effort, infection, excès de sel alimentaire, poussée de tension
- une diminution de sa force : infarctus, toxique, arrêt des traitements
Plus le cœur est fragile, plus le risque d’œdème pulmonaire est grand et les récidives fréquentes.
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Les symptômes
Le principal symptôme de l’Œdème Aigu du Poumon (OAP) est un essoufflement d’aggravation rapide, persistant, très angoissant. Il est souvent associé à des sueurs. L’évolution sans traitement peut être mortelle.
Dans les cas extrêmes on peut noter d’autres symptômes comme :
- une impossibilité à parler,
- une diminution de conscience,
- l’apparition d’une cyanose (coloration bleue des lèvres, des doigts…).
L’OAP peut aussi être plus progressif et précédé de difficultés à respirer à l’effort ou en position allongée (obligeant à se mettre assis), ainsi que d’autres signes d’insuffisance cardiaque (gonflement des jambes, fatigue…).
Traitements et conseils
Comme dans tous les cas d’essoufflement brutal, il faut contacter les secours (numéro appel 15) et décrire le plus précisément les symptômes et les signes de gravité :
- la personne ne parle plus,
- présence de cyanose,
- éventuellement perte de conscience.
Cela permettra d’adapter les secours.
A savoir : En cas d’Œdème Aigu du Poumon, il faut rester calme, en position assise (et non allongée), ne pas tenter de marcher pour diminuer le travail du cœur au maximum.
Enfin, les secours vont administrer un traitement médicamenteux : tout d’abord de l’oxygène, si cela ne suffit pas on peut avoir recours à des méthodes plus invasives (masque de ventilation ou intubation avec anesthésie générale).
Après ces premiers traitement d’urgence suit un traitement médicamenteux avec des diurétiques et le traitement de la cause (tachycardie, hypertension).
La prévention
La prévention de l’OAP s’adresse tout d’abord aux patients connus pour avoir une insuffisance cardiaque, en particulier s’ils ont déjà présenté des symptômes. Dans ce cas, il est important de ne jamais interrompre son traitement de fond sans l’accord d’un médecin car il maintient le cœur au repos et dans une sorte d’équilibre.
Dans les cas les plus graves, une restriction hydro-sodée peut être prescrite, c’est-à-dire une limitation des apports alimentaires en sel et en eau : ce sont souvent ces ingrédients en excès qui occasionnent la décompensation cardiaque.
Il est important de connaître les premiers signes de décompensation cardiaque afin de prévenir son médecin qui pourra adapter le traitement précocement en consultation. Il est en effet bien plus facile et rapide d’intervenir au début de la décompensation plutôt que d’attendre les signes de gravité qui nécessitent alors souvent une hospitalisation.
Ces signes sont ceux de l’insuffisance cardiaque :
- dyspnée : essoufflement pour des efforts de plus en plus minimes
- orthopnée : essoufflement et toux en position allongée, nécessitant de dormir assis
- œdème des membres inférieurs : jambes gonflées, prise de poids rapide
L’activité physique régulière est un traitement très efficace pour améliorer les symptômes et diminuer le nombre d’hospitalisations pour insuffisance cardiaque. Elle peut être initiée en milieu médical (rééducation cardiaque), mais les efforts personnels sont à poursuivre sur le long terme. En effet, tout bénéfice est perdu après 3 semaines d’inactivité.
Les effets sont également bénéfiques sur le poids, la tension, l’équilibre du diabète, le taux de cholestérol et le moral… De quoi préférer les escaliers à l’ascenseur.
Sans oublier l’importance de la prévention cardiovasculaire classique pour éviter la cardiopathie en amont : arrêt du tabac, traitement du diabète, HTA et cholestérol.
Auteur : Dr Marion Angue, cardiologue et réanimatrice médicale