L’aphasie est une altération du langage, c’est-à-dire de l’usage des signes au moyen desquels les hommes échangent des idées entre eux.
L’aphasie est ce qu’on appelle un trouble du langage acquis, c’est-à-dire qui est provoqué par une lésion cérébrale.
Il existe différents types d’aphasie en fonction des zones cérébrales contrôlant le langage qui sont endommagées. Les thérapies verbales peuvent permettre une amélioration de ces troubles du langage.
C’est un médecin, Trousseau, qui a crée le terme aphasie en 1864. Littéralement ce mot vient du grec : “a” privatif et “phasis”, la parole. Il désigne donc l’impossibilité de traduire la pensée par des mots, malgré l’intégrité fonctionnelle du larynx, de l’organe vocal.
Mais l’étude des troubles du langage, remonte presque aux tous premiers écrits. En effet, il y a au moins 3 000 ans, les premiers compte-rendus médicaux d’Egypte, nommés Papyrus chirurgical d’Edwin Smith, rapportaient des cas de sujets ayant perdu la parole à la suite d’un traumatisme cérébral.
C’est par ces multiples études d’individus souffrant d’aphasie qu’on a pu, au fur et à mesure des siècles, connaître de manière de plus en plus précise, les zones qui contrôlent le langage chez les êtres humains : les droitiers, soit 90 à 95 % d’entre nous, utilisent leur hémisphère gauche pour parler. Quant aux gauchers, qui représentent 5 à 10% de la population, ils se servent de leur hémisphère droit.
Plus précisément, les centres du langage sont situés dans certaines régions hémisphériques bien précises :
- l’aire de Broca,
- l’aire de Wernicke et
- la circonvolution supramarginale.
On conçoit donc que l’endommagement d’une de ces régions soit responsable de la perte d’une fonction précise du langage.
Aphasie : les causes
Une aphasie résulte d’une altération au niveau d’une zone cérébrale du langage. La détermination de sa localisation dépend de sa symptomatologie.
Ainsi, une altération au niveau de l’aire de Broca provoque un manque du mot et une difficulté d’articulation. En effet, cette aire, située dans le lobe frontal (partie du cerveau qui est en avant), est responsable de la production de la parole.
Une atteinte de l’aire de Wernicke cause quant à elle une perte de la compréhension et de dénomination. La personne n’émet qu’un simple jargon incompréhensible. Cette aire située dans le lobe temporal (partie du cerveau qui est sur le côté) est responsable de la compréhension du langage.
Quant à la circonvolution supramarginale, il s’agit de la zone située non loin de l’aire de Wernicke et responsable de la répétition des paroles entendues.
Il arrive par ailleurs qu’une atteinte plus profonde du cerveau, dans les noyaux gris centraux ou la substance blanche, entraînent une aphasie. En effet, le langage est un phénomène complexe pour lequel de nombreuses fonctions cérébrales rentrent en jeu.
Le type d’atteinte cérébrale en cause dans les aphasies est variable : l’altération peut être secondaire à un accident ou une agression physique ayant provoqué un traumatisme crânien, ou suite à une opération neurochirurgicale avec ablation d’une partie du cerveau
D’autres maladies, comme un accident vasculaire cérébral, une tumeur cérébrale, une infection cérébrale (encéphalite), peuvent être en cause dans l’apparition d’une aphasie. Enfin, les démences, la plus commune étant la maladie d’Alzheimer, peuvent expliquer une aphasie.
Aphasie : les symptômes
En fonction de la zone de langage atteinte, les symptômes diffèrent.
L’aphasie de Broca (par endommagement de l’aire de Broca) est caractérisée principalement par les symptômes suivants :
- Des troubles arthritiques c’est-à-dire une impossibilité à exercer volontairement des mouvements précis de la langue ou des lèvres.
- Une compréhension du langage qui est relativement conservée.
- Une réduction de la spontanéité verbale et un manque du mot : on parle d’aphasie à élocution non fluente.
- Une difficulté à dénommer les personnes ou les objets : anomie.
L’aphasie de Wernicke (par endommagement de l’aire de Wernicke) est caractérisée principalement par les symptômes suivants :
- Une absence de trouble articulatoire.
- Des troubles de la compréhension parfois très importants : les patients sont incapables de comprendre ce qu’ils lisent ou entendent.
- Des difficultés dans la répétition de mots et de phrases.
- Une fluence verbale conservée voire exagérée, avec un important débit verbal.
- Des paraphasies, c’est-à-dire la substitution d’un mot par un son, un mot incorrect ou un mot non intentionnel. Le discours de ces patients est donc souvent incompréhensible (jargon). Il peut par exemple prononcer des paraphasies phonémiques (bilo à la place de stylo), ou des paraphasies verbales (remplacement d’un mot par un autre n’ayant pas le même sens).
L’aphasie globale est caractérisée par la perte totale de la capacité de comprendre le langage, de parler, de lire ou d’écrire. L’aire cérébrale endommagée est vaste, incluant notamment l’aire de Broca, l’aire de Wernicke et la circonvolution supramarginale. Le pronostic d’une récupération du langage est extrêmement réservé.
L’aphasie de conduction est caractérisée principalement par :
- un langage fluent.
- presque pas de changement dans la compréhension du langage oral.
- d’extrêmes difficultés à répéter des mots ou des phrases.
Cette aphasie résulterait, selon certains chercheurs, de l’endommagement du faisceau arqué qui relie l’aire de Wernicke à l’aire de Broca.
Aphasie : les traitements
Le traitement d’une aphasie repose d’abord et avant tout sur le traitement de la cause. Si celle-ci est prise en charge rapidement, la zone cérébrale peut être préservée, au moins partiellement, et permettre un retour du langage.
Parfois, l’aphasie est résolutive spontanément. C’est le cas dans les accidents ischémiques transitoires (un AVC transitoire). Cependant, un traitement du terrain vasculaire reste nécessaire pour éviter une récidive de l’AVC.
Lorsque l’aphasie persiste malgré le traitement de la cause, une rééducation orthophonique du langage est indiquée. Celle-ci peut permettre de récupérer, au moins partiellement, l’usage du langage. Cette rééducation peut débuter lors de l’hospitalisation, de manière quotidienne, et se poursuivre en ambulatoire dans un cabinet d’orthophonie. Elle peut parfois durer plusieurs années. Le but est que la personne puisse retrouver des capacités de communication avec son entourage. L’efficacité et la durée du suivi dépendent de plusieurs éléments.
Les thérapies du langage sont d’autant plus efficaces que :
- le traitement orthophonique est précoce.
- le suivi orthophonique est régulier et la personne motivée.
- la cause de l’aphasie est un traumatisme plutôt qu’un accident vasculaire cérébral.
- l’aphasie est modérée.
- la personne touchée est gauchère ou qu’elle a des proches parents gauchers.
Certains auteurs scientifiques se sont penchés sur l’intérêt d’un médicament dans le traitement des aphasies. Mais les études mises en oeuvre n’ont à ce jour pas donné assez de preuves en ce sens.
Aphasie : sources et notes
– Sémiologie des fonctions cognitives, Collège des Enseignants de Neurologie.
– Greener J, Enderby P, Whurr R. Pharmacological treatment for aphasia following stroke. Cochrane Database of Systematic Reviews 2001, Issue 4. Art No.: CD000424.
Auteur : Dr F. Duncuing-Butlen et Dr Ada Picard.