L’algodystrophie : comment faire pour ne plus avoir mal !
Les choses se sont compliquées après votre accident articulaire, ou suite à une opération chirurgicale. Des fourmillements, des élancements, des douleurs… Le médecin diagnostique une algodystrophie. Un nom un peu “barbare” qui correspond à un problème gênant, risquant malheureusement de durer quelques mois.
L’algodystrophie est également dénommée (de façon aussi complexe) agloneurodystrophie, ou encore Syndrome douloureux régional complexe (SDRC).
Elle peut toucher différentes parties du squelette : le pied, la cheville, la jambe, le poignet, le coude, l’épaule… Il s’agit d’une complication imprévisible qui se déclenche généralement après un traumatisme articulaire plus ou moins grave (fracture, entorse, luxation…), ou encore après une intervention chirurgicale osseuse ou articulaire. Cette affection touche plus souvent les femmes que les hommes. Elle se manifeste surtout par des douleurs de la cheville, ou de la jambe, ou du bras…
L’algodystrophie n’a rien à voir avec une éventuelle infection, ou un hématome qui auraient pu apparaître suite au traumatisme (ou à l’intervention chirurgicale). En réalité, on ne connaît pas l’origine exacte de ce phénomène dans lequel le système nerveux est impliqué. Algo signifie douleur, et dystrophie signifie troubles trophiques (chaleur, oedème, sudation ou au contraire sécheresse de la peau).
Sans que l’on sache exactement pourquoi, cette maladie touche en moyenne trois fois plus de femmes que d’hommes. Une algodystrophie est très rare chez les enfants.
L’algodystrophie disparaît en moyenne en 6 à 12 mois, mais elle peut aussi, chez 10 % des malades, persister plusieurs années et laisser des séquelles définitives et même invalidantes.
Apprenez ce qu’est précisément une algodystrophie, et ses différentes localisations. Découvrez ses différents traitements. Lisez ensuite les conseils d’un médecin spécialiste qui indique quels médecins consulter en cas d’algodystrophie, et le témoignage d’un patient qui raconte son expérience de la maladie.
Algodystrophie : les causes
Les algodystrophies (ou syndrome douloureux régional complexe) sont des troubles des os et des articulations qui touchent le poignet, la main, l’épaule ou le pied, plus rarement la hanche, le coude et le genou.
Les causes véritables de l’algodystrophie ne sont pas encore connues. Il existerait une “hyper-réaction” du système nerveux (dit sympathique) souvent liée à un traumatisme osseux ou articulaire, ou à une opération des os, des articulations. Les fibres nerveuses impliquées dans ce phénomène sont des fibres nociceptices (de type C). A cela se conjuguent des phénomènes vasomoteurs touchant la micro-circulation. Ainsi, en cas d’algodystrophie, il existe localement une dilatation de nombreuses unités artério-capillaires, surtout au début quand surviennent des signes inflammatoires.
Une maladie métabolique, comme un diabète, ou une affection de la thyroïde, peuvent aussi favoriser une algodystrophie. En tous les cas, l’algodystrophie est malheureusement une affection assez fréquente, et les personnes qui en ont souffert savent qu’elle est difficile à résoudre.
L’algodystrophie apparaît le plus souvent (65% des cas) à cause d’un traumatisme, grave ou bénin : fracture, luxation, entorse, simple contusion. Elle peut aussi survenir après n’importe quelle intervention chirurgicale après un traumatisme, ou pour corriger des déformations articulaires (20% des cas), ou encore à la suite de l’immobilisation prolongée d’un membre dans un plâtre.
Mais d’autres fois, il est difficile de retrouver la cause précise.
D’autres facteurs favorisent la maladie, sans en être la cause :
> Des problèmes de circulation (une phlébite),
> Certaines affections, comme un diabète,
> Les atteintes du système nerveux central (hémiplégie, tumeur cérébrale), ou périphérique (sciatique, zona…),
> Un infarctus du myocarde,
> La grossesse peut provoquer une algodystrophie de la hanche au cours du troisième trimestre
> La prise de certains médicaments (comme les barbituriques en cas de traitement anti-épileptique),
> Un état anxieux ou dépressif.
C’est le plus souvent un médecin spécialiste en rééducation fonctionelle ou un rhumatologue qui prend en charge le patient souffrant de cette affection. On peut aussi consulter le chirugien orthopédique qui a opéré, ou qui a traité le traumatisme osseux ou articulaire (si l’algodystrophie est survenue dans un tel contexte).
Algodystrophie : les symptômes
Les symptômes d’une algodystrophie (syndrome douloureux régional complexe) : au début, la douleur s’installe brutalement, avec des élancements, fourmillements, picotements… Présente au repos, la douleur s’amplifie souvent quand on touche l’articulation, quand on la bouge, ou bien à la faveur d’émotions, de bruits ou de variations de température.
Le membre ou l’articulation perd de sa vigueur et de sa mobilité, prend un aspect enflammé avec un oedème, une peau rouge et moite. Peuvent apparaître aussi des crampes, localement une hypersudation, et une raideur du membre atteint. La zone concernée devient légèrement gonflée, chaude, avec parfois des fourmillements, des brûlures et des douleurs. L’intensité des douleurs est variable mais aggravée par les mouvements. Ce stade dure environ trois mois, parfois moins, parfois plus. Et chez certaines personnes les symptômes peuvent évoluer.
La douleur peut s’aggraver et devenir en même temps plus diffuse. L’oedème diminue, le membre est souvent froid et s’affaiblit tandis que la peau devient pâle ou bleutée et fine. Elle peut être suintante, graisseuse ou bien au contraire devenir sèche et commence alors à se rétracter. Les ongles peuvent également s’abîmer et les poils tomber. L’articulation peut s’enraidir de manière progressive. Dans ces formes sévères, si aucun traitement n’est entrepris, les douleurs persistent et peuvent s’étendre à tout le membre, avec un risque d’atrophie musculaire.
Ces différents stades de l’algodystrophie que les médecins qualifient de “chaud” puis “froid”, ne sont pas systématiques. Des patients peuvent d’emblée avoir des signes de sécheresse et de pâleur cutanée, sans rougeur, ni inflammation auparavant. Puis les choses rentreront dans l’ordre et la douleur disparaîtera progressivement. Mais il arrive – heureusement c’est rare – que les choses s’aggravent, et surviennent alors des rétractions irréversibles de la peau et des tendons.
Il existe plusieurs étapes liées au développement de la maladie. Cependant, chaque individu réagit de manière personnelle et présente des symptômes et des évolutions qui peuvent varier.
On peut constater des signes de déminéralisation osseuse, en effectuant une radiologie osseuse. D’autres examens sont parfois réalisés : une scintigraphie osseuse, une imagerie par résonance magnétique (Irm) surtout en cas d’atteinte de la hanche ou du genou.
Algodystrophie : de la main
La main est une localisation fréquente de l’algodystrophie, ou du Syndrome douloureux régional complexe. Quelque temps après un traumatisme (comme une fracture du poignet, parfois traitée par une opération chirurgicale… ou pas), le patient est gêné par des manifestations qui apparaissent de façon progressive : la main tend à être plus gonflée, enflée, chaude ou au contraire froide, d’aspect rougeâtre… Ces symptômes sont d’autant plus nets que la main opposée ne présente pas ces problèmes.
Le patient se plaint aussi de douleurs et d’une sudation plus importante au niveau de la main. Il a beaucoup de mal à l’utiliser. Cette douleur est lancinante, existant au repos, et tend à s’accentuer quand le patient mobilise sa main et ses doigts. Parmi les complications : il arrive que ces symptômes surviennent sur d’autres régions du corps (os et articulations).
Puis généralement, au bout de quelques semaines à quelques mois, ces signes tendent à s’apaiser. Par la suite, tout rentre dans l’ordre.
Il arrive cependant que des séquelles persistent durant plusieurs mois, avec une main qui présente des troubles trophiques, la peau a un aspect un cireux, est froide et les doigts sont comme ankylosés, restant volontiers en position semi-fléchie. La personne se sert difficilement de sa main et de son poignet.
Le médecin peut prescrire des examens : une radiographie, une scintigraphie.
A noter qu’une algodystrophie de la main peut aussi survenir après une opération du canal carpien.
Les traitements (lire plus loin) d’une algodystrophie de la main commencent par des médicaments contre la douleur, mais aussi des massages et exercices de rééducation fonctionnelle.
A noter : ce que l’on appelait encore il y a quelques années un syndrome épaule-main correspond en fait à une algodystrophie du membre supérieur avec une atteinte de l’épaule (enraidissement), puis de la main.
Algodystrophie : du pied
L’algodystrophie du pied, aussi appelé Syndrome douloureux régional complexe (ou anciennement nommé le Syndrome de Sudeck-Leriche du nom des médecins qui ont décrit cette pathologie) est aussi assez fréquente. Elle peut survenir plusieurs jours à plusieurs semaines après une entorse, une fracture. Mais parfois après une opération du pied, comme par exemple après une intervention pour un hallux valgus. D’autres fois, la cause n’est pas vraiment identifiable, même si certaines maladies ou problèmes de santé peuvent favoriser la survenue d’une alogdystrophie au pied : un diabète, une phlébite… une dépression.
Les premiers signes d’une algodystrophie du pied ou de la cheville peuvent, par exemple, apparaître quand on enlève le plâtre. Un oedème survient sur le dos du pied, et à la cheville. La peau peut être bleue, suitante, et chaude. Le Syndrome douloureux régional complexe du pied se manifeste généralement d’abord par des signes inflammatoires, puis ensuite, au bout de quelques semaines par des signes trophiques (peau blanche, cireuse).
En raison des douleurs, la personne boite, mais la douleur est souvent aussi spontanée et lancinante.
Les symptômes peuvent s’étendre à l’ensemble de la jambe, en particulier au genou, vers la hanche. Ce qui peut poser parfois des difficultés pour le médecin à effectuer un diagnostic, surtout quand les manifestations cutanées et trophiques sont peu présentes.
Les signes peuvent évoluer avec un enraidissement articulaire au niveau du pied, de la cheville et des orteils, gênant encore davantage la marche.
Des radiographies, voire une scintigraphie osseuse peuvent être effectuées. On y remarque alors généralement des signes assez typiques de la maladie.
Les traitements (lire plus loin) d’une algodystrophie du pied consistent d’abord à prendre des médicaments antalgiques, mais aussi d’effectuer des séances de rééducation fonctionnelle, avec des massages, de la balnéothérapie (surtout en phase “chaude”).
Algodystrophie : du genou
L’algodystrophie touchant le genou n’est pas la localisation la plus fréquente de cette maladie. Nommée aussi Syndrome douloureux régional complexe, l’algodystrophie peut survenir suite à une opération (comme une arthroscopie, une intervention sur un ménisque ou un ligament croisé…) ou suite à un traumatisme. D’autres fois, l’algodystrophie du genou survient de façon spontanée, favorisée par une maladie, comme un diabète, des problèmes cardiaques…
Les manifestations sont : le genou devient douloureux, rouge, la peau est chaude et parfois avec de la sueur… La douleur est le plus souvent continue, mais s’exacerbe souvent en mobilisant l’articulation. Au début, le médecin peut penser à juste titre à une arthrite (inflammatoire ou infectieuse). Les raisons d’une douleur au genou peuvent être très nombreuses, expliquant qu’il n’est pas toujours facile pour le médecin d’établir rapidement le diagnostic d’algodystrophie.
Dans certaines formes d’algodystrophie du genou, l’articulation peut parfois se remplir de liquide. L’articulation se trouve moins sollicitée. Il peut s’ensuivre une amyotrophie du muscle quadriceps sur le dessus de la cuisse.
L’analyse de sang est normale, ne montre pas de syndrome inflammatoire. Des radiographies montrent des anomalies de la trame osseuse, avec de minuscules orifices visibles au niveau osseux, une déminéralisation. Une scintigraphie peut être aussi demandée. Parfois une IRM.
Le mieux est de pouvoir faire le diagnostic d’algodystrophie du genou de façon précoce pour commencer la prise en charge qui débute par des médicaments antalgiques prescrit par le médecin. Ceux-ci permettront de mettre en route une rééducation fonctionelle avec des exercices de kinésithérapie pour garder au maximum une bonne souplesse articulaire avec de bonnes amplitudes, et pour éviter des phénomènes de rétractions articulaires.
Malgré ces traitements, le patient reste tout de même assez géné. La prise en charge permet d’éviter que les choses ne s’aggravent trop. Et la plupart du temps, tout rentre dans l’ordre au bout de quelques mois.
Algodystrophie : les traitements
Il n’existe pas encore de traitement codifié de l’algodystrophie, étant donné que l’on ignore la véritable cause de cette pathologie. On a recours à des traitements qui diffèrent selon le stade de développement de l’algodystrophie.
Mieux vaut être prévenu : cela peut être long, difficile et parfois décevant mais il faut persévérer, ne pas se décourager. Quoiqu’il en soit, il faut attendre de longs mois avant de conclure à d’éventuelles séquelles définitives. Le traitement associe en général des médicaments, et des exercices de rééducation (kinésithérapie) et de physiothérapie, d’hydrothérapie. Cette rééducation ne doit pas être trop brutale. Une rééducation agressive peut en effet s’avérer contre-productive et générer ou entretenir une algodystrophie.
Il s’agit d’abord de traitements classiques contre la douleur : des médicaments antalgiques, des anti-inflammatoires et parfois même de la morphine. Des injections intra-musculaires ou sous-cutanées de calcitonine (un traitement hormonal qui agit sur le métabolisme osseux) autrefois prescrites, ne sont plus utilisées actuellement.
Dans les cas d’algodystrophies les plus rebelles, on peut être orienté vers un centre de rhumatologie pour une prise en charge plus importante. Parmi les différents traitements, une série d’injections dans une veine est parfois effectuée sous la surveillance d’un anesthésiste (on parle de bloc régional intraveineux ou de bloc sympathique). Cette méthode qui fait encore l’objet d’études, peut conduire à des résultats intéressants.
L’homéopathie, la phytothérapie et l’acupuncture sont également parfois utilisées.
Une rééducation fonctionnelle est entreprise dans un second temps. Son objectif est d’entretenir la souplesse des articulations, de limiter la douleur et d’éviter les enraidissements articulaires.
Il existe plusieurs moyens, notamment les bains “écossais” (alternance de chaud et de froid) surtout en phase “chaude” de la maladie, mais aussi les massages, l’ergothérapie.
Algodystrophie : nos conseils
Si dans la majorité des cas, les traitements contre l’algodystrophie apportent un bénéfice, ils manquent parfois d’une réelle efficacité, d’où l’intérêt après un traumatisme, de prendre quelques mesures préventives, quelques astuces à savoir :
> Faites-vous régulièrement surveiller en période de contention (quand la jambe ou le bras sont immobilisés dans un plâtre par exemple).
> Évitez une immobilisation trop prolongée (elle doit être la plus courte possible). Même si votre bras est dans un plâtre, ne restez pas inactif.
> Entamez une rééducation douce, le plus vite possible.
Les conseils du médecin spécialiste
Entretien avec le Docteur Georges Dalzotto, médecin spécialiste, chirurgien orthopédique et traumatologique.
Qui faut-il consulter en cas de douleurs ?
Dr Georges Dalzotto : Le plus souvent, la maladie apparaît à la suite d’un traumatisme, c’est donc le chirurgien orthopédique qui vous a pris en charge qui est amené à établir le diagnostic d’algodystrophie. Pour cela, il pourra s’aider d’examens complémentaires comme la radiographie, la scintigraphie osseuse, voire l’IRM. Vous pouvez également consulter un rhumatologue mais avec le nouveau parcours de soins, il vous faudra au préalable voir votre médecin généraliste (traitant).
L’algodystrophie surviendait plus souvent chez des sujets anxieux, dépressifs, hyperactifs…
Dr G. D : Il faut être prudent car il n’existe aucune preuve formelle à ce propos. Mais il est vrai que parmi les malades touchés par des algodystrophies invalidantes, on retrouve un pourcentage plus élevé de personnes très anxieuses, angoissées, avec des soucis d’ordre personnel. Dans ce cas, des traitements antidépresseurs peuvent être prescrits en complément.
Algodystrophie : le témoignage d’un patient
Gilberte, 68 ans, souffre d’algodystrophie au bras depuis 8 mois. Elle apporte son témoignage :
Quels sont été les premiers signes de l’algodystrophie ?
Ça a commencé l’été dernier quand je me suis fracturée le bras en tombant dans l’escalier. On m’a alors plâtrée. Mais assez rapidement, une douleur a gagné le coude et la main. Mon bras était très gonflé, je ne pouvais plus le bouger pendant 3 mois. Je souffrais de vomissements et de diarrhées. Ma main était très froide, puis très chaude, puis à nouveau froide…
Comment a été diagnostiqué l’algodystrophie ?
Mon chirurgien a alors diagnostiqué un syndrome algodystrophique “épaule-main” et m’a prescrit 60 séances de kiné (massages et physiothérapie). Depuis, mon coude a dégonflé mais ma main reste enflée et elle est en permanence gelée. Mes doigts sont raides, je n’arrive pas à les plier, ni à remettre mon alliance.
Dans votre cas, la douleur dure depuis pas de temps…
C’est une souffrance difficile à supporter. Dans mon cas, cela fait 8 mois et ce n’est pas fini, m’a-t-on dit. Il faut beaucoup de patience. Mon chirurgien m’a prescrit 15 nouvelles séances de kiné et je continue à prendre des médicaments contre la douleur.
Auteurs : Amaury Chardeau et Dr Nicolas Evrard.
Consultant expert : Dr Georges Dalzotto, chirurgien orthopédique à l’Hospitalor de Saint-Avold (Moselle).
Algodystrophie : Sources et notes
– Revol M., Servant J. L. Algodystrohie de la main, Fiche d’information des patients, Service de chirurgie plastique, Hôpital Saint-Louis, Mai 2006.
– Association SOS algodystrophie, Association française des malades atteints du syndrome d’algodystrophie (Afmasa).