L’hypocondrie est un trouble “imaginaire” sous-tendu par des fausses interprétations de certains signes physiques, que le patient juge anormaux et révélateurs d’une maladie.
Le terme hypocondrie a été crée par Hippocrate. Il désignait initialement des sujets se croyant atteints de maladies affectant les organes situés dans les hypocondres. Ces derniers correspondent aux régions situés en haut de l’abdomen, avec du côté droit, comme organe: la majeure partie du foie et la vésicule biliaire ; et à gauche l’estomac, une partie du côlon (à gauche). L’hypocondriaque a parfois tendance à se palper ces régions de l’abdomen…
L’hypocondriaque est un “malade imaginaire” qu’il est difficile de rassurer sur son état de santé. Même lorsqu’aucune anomalie physique n’est retrouvée. Les plaintes incessantes de ces patients finissent par épuiser l’environnement socio-familial. Les hypocondriaques sont souvent progressivement exclus de leur réseau relationnel.
Le trouble peut débuter suite à des évènements de vie qui sont vecteurs d’insécurité, comme un déménagement, un changement d’emploi ou encore la perte symbolique ou réelle d’un proche.
L’hypocondriaque est donc persuadé d’être atteint d’une maladie qu’il a lui-même inventé. Ses plaintes sont souvent des manifestations douloureuses ou des préoccupations exagérées concernant le fonctionnement d’un organe, souvent le tube digestif.
Parfois, l’hypocondriaque a peur de contracter une maladie “d’actualité”, c’est-à-dire celle dont les médias parlent le plus à un moment donné (le sida, le cancer du sein, l’infarctus, la grippe aviaire, etc.).
Hypocondrie : les causes
Les causes de l’hypocondrie sont psychologiques. Les explications qui sous-tendent cette maladie varient en fonction des écoles théoriques.
Dans tous les cas, la peur d’avoir ou de contracter une maladie résulte d’une interprétation erronée des manifestations corporelles ou de fausses croyances concernant la maladie.
Freud attribuait l’hypocondrie à une difficulté à appréhender sa sexualité. Selon lui, les préoccupations corporelles exagérées de l’hypocondriaque seraient l’expression d’une libido non assouvie par la voie habituelle. D’autres psychanalystes ont poursuivi en pensant que l’hypocondrie résultait d’une peur de la sexualité.
Selon d’autres auteurs, non psychanalystes, les expériences vécues en tant que nourrisson peuvent être en cause dans l’apparition d’une hypocondrie à l’âge adulte. Par exemple, l’excès de soins physiques ou la négligence dans la petite enfance, pourraient favoriser l’angoisse hypocondriaque. De la même façon, l’excès d’attentions donné aux sensations physiques de la part des parents, peut être intégré dans l’enfance et devenir une source d’angoisse à l’adolescence et à l’âge adulte.
En résumé, l’interprétation erronée des signes corporels de l’hypocondrie serait forgée par des expériences vécues ou des exemples observés autour de soi durant l’enfance ou l’adolescence. Il n’est d’ailleurs pas rare que d’autres cas d’hypocondrie soient observés dans la famille.
Les causes neurobiologiques n’ont à ce jour pas été suffisamment étudiées.
Hypocondrie : les symptômes
L’hypocondriaque est perpétuellement en train de se scruter, d’écouter ses sensations corporelles et de les interpréter comme des symptômes d’une maladie.
De telles inquiétudes vont amener l’hypocondriaque à consulter de nombreux médecins et à multiplier les examens complémentaires pour tenter de découvrir cette maladie qui le fait tant souffrir. Et le plus souvent, ses demandes restent inassouvies. Car le corps médical n’arrive jamais à satisfaire le malade qui est ainsi en position constante de rivalité par rapport à la médecine et ses représentants.
Il ne faut pas confondre hypocondrie, simulation et trouble psychosomatique…
Contrairement au simulateur, l’hypocondriaque ne fait pas semblant. Il est réellement persuadé d’être malade. De plus, cette croyance erronée n’est pas raisonnable par autrui. L’hypocondrie n’est pas non plus du registre des maladies psychosomatiques pour lesquelles on peut objectiver des lésions organiques ou, en tous les cas, des perturbations du fonctionnement de certains organes. Dans l’hypocondrie, il n’y a pas d’atteinte physique, et les symptômes sont le plus souvent sur-interprétés.
Toutefois, des plaintes hypocondriaques peuvent se greffer sur des maladies organiques authentifiées. Mais, dans ce cas précis, il y aura une différence entre les inquiétudes du patient et son réel état de santé.
Hypocondrie : les traitements
Le traitement de l’hypocondrie repose avant tout sur la psychothérapie.
L’hypocondriaque va tester l’endurance de son ou de ses médecin(s) à essayer de le soigner. Un des risques majeurs est justement l’épuisement du corps médical devant cette succession de plaintes physiques pour lesquelles aucune cause physique n’est jamais retrouvée. Mais, on peut être à la fois hypocondriaque et atteint un jour ou l’autre par une maladie organique authentique et grave. L’hypocondriaque “se sert” donc de cette peur de passer à côté d’un diagnostic grave pour entraîner les soignants dans sa névrose.
A force de se sentir mal soigné, l’hypocondriaque peut développer des symptômes comportementaux, comme une agressivité envers le corps médical. On parle alors d’hypocondriaques persécuteurs qui veulent se venger et qui se mettent à poursuivre leur médecins (procès, scandale voire tentative de meurtre). Mais cette évolution est, fort heureusement, rare !
Le traitement le plus approprié de l’hypocondrie est la psychothérapie, idéalement la psychothérapie cognitive et comportementale. Cette méthode permet de comprendre et de moduler les fausses interprétations caractéristiques de l’hypocondrie.
L’hypocondriaque épuise son entourage et ses proches avec ses inquiétudes perpétuelles qui ne sont pas accessibles à la réassurance. L’entourage doit ainsi faire preuve de recul, et ne pas se laisser emporter par les croyances erronées du malade. Il doit garder du mieux qu’il peut une position rassurante face à la personne hypocondriaque. Cette maladie évolue donc souvent vers une invalidité sociale et aussi professionnelle.
La dépression est également une complication possible de l’hypocondrie.
Hypocondrie : Sources et notes
– M. Lejoyeux, EMC – Psychiatrie, Volume 2, Issue 4, November 2005, Pages 247–258
– V. Kapsembelis, Manuel de psychiatrie clinique et psychothérapique, Pufadulte, 2012.