Fente labio-palatine

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La fente labio-palatine que l’on a connue pendant longtemps sous le nom de bec-de-lièvre est une malformation qui est très facilement corrigée via une chirurgie réparatrice.

Le saviez-vous ? Pendant des siècles, une croyance populaire a associé la fente labio-palatine des enfants, à une rencontre de leur mère avec un lièvre ou un lapin pendant la grossesse, en raison de l’apparence de la région de la bouche qui rappelle celle du lièvre. C’est ce qui a donné le nom de « bec-de-lièvre », appellation hideuse heureusement abandonnée aujourd’hui.

Pourtant il n’y a rien d’ésotérique dans ce défaut physiologique de fermeture des tissus de la zone formant la bouche. Pour comprendre la formation de la fente labio-palatine, il faut savoir que l’embryon est composé de trois feuillets qui vont se développer en bourgeons puis en différents tissus et organes.

Dès les premières semaines, de la 5ème à la 8ème de grossesse (pour être exact), alors que l’embryon débute sa croissance, apparaissent les bourgeons qui correspondent à la face et qui convergent l’un vers l’autre. C’est comme si on avait deux pans d’un tissu qu’on tirait vers le milieu pour n’en faire qu’un seul.

On peut parfaitement voir cette délimitation au niveau du petit creux qu’il y a entre le nez et la lèvre supérieure (appelé philtrum ou arc de Cupidon).

Dès le 36ème jour, les bourgeons se rejoignent pour fusionner sous l’emplacement du nez, formant les narines et la lèvre. Si cette fusion ne se fait pas correctement, on a à faire à une fente labiale, qui peut être partielle ou totale :

  • Lorsqu’elle est d’un seul côté on évoque une fente unilatérale,
  • des deux côtés elle est bilatérale.

Au 40ème jour, c’est au niveau du palais que va se faire la fermeture. Si elle ne se fait pas non plus comme il se doit, en plus de la fente labiale, il y aura une fente palatine (du palais).

Les échographies de la grossesse semaine après semaine :

Les causes

La formation du visage tel que nous le voyons est le résultat d’un tas de mécanismes, plus complexes les uns que les autres. Il suffit d’un manque ou d’une erreur à un niveau, pour que les mouvements pour arriver à la fusion finale ne se fassent pas de façon harmonieuse.

Fente labio-palatine : une combinaison de facteurs génétiques et environnementaux

Les véritables raisons qui aboutissent à ce défaut de fermeture ne sont pas encore très claires, même si beaucoup d’hypothèses sont mentionnées pêle-mêle.

Evidemment la piste génétique est toujours évoquée mais elle est souvent liée à une pathologie, la plus connue étant le syndrome de Van Der Woude. Dans ce cas la transmission est héréditaire, sinon un parent ayant une fente labio-palatine n’aura généralement pas d’enfant porteur de la malformation.

A savoir : Le syndrome de Van Der Woude est la 1ère cause de fente labiale (au niveau de la lèvre), de fente palatine (au niveau du palais) ou de fente labio-palatine, en rapport avec une mutation d’un seul gène (hérédité dite mendélienne). Elle est communément associée à une agénésie dentaire (absence d’une ou plusieurs dents).

Les scientifiques proposent plusieurs origines qui peuvent être uniques ou multifactorielles :

  • L’environnement : bien qu’il n’y ait pas encore de certitude, des recherches portent sur l’environnement pendant la grossesse, concernant les effets délétères des produits chimiques ou des virus. Rien n’est encore établi de façon formelle.
  • Le tabac et l’alcool pendant la grossesse sont montrés du doigt. Il est aujourd’hui établi avec certitude qu’il faut les éviter pendant la grossesse.
  • Un dysfonctionnement lors de la division cellulaire, en lien entre autres, avec l’apoptose (mort cellulaire).
  • Des facteurs épigénétiques : une mauvaise traduction des « ordres » transmis par l’ADN.

Le saviez-vous ? Dès la naissance d’un individu, ses cellules sont programmées pour un nombre défini de divisions : c’est le cycle de la cellule. Quand une cellule atteint son nombre maximal de divisions, c’est la mort cellulaire (aussi appelé apoptose). Ainsi, au terme d’une vie survient le décès. 

Parmi les causes qui sont énumérées, certains pensent à la prise de médication, bien que nombre de ceux-ci soient interdits pendant la grossesse, dont certains formellement car ils sont tératogènes. Il s’agit principalement :

  • Des antiépileptiques
  • Des corticoïdes
  • Des rétinoïdes qui sont des dérivés de la vitamine A, utilisés en dermatologie
  • Des antagonistes de la vitamine B9 ou acide folique. Pendant la grossesse une supplémentation en acide folique est administrée pour anticiper un défaut de fermeture du tube neural et éviter le spina bifida. Pourtant il n’y a pas de démonstration scientifique associant cette vitamine à la fermeture des bourgeons de la face.

Les symptômes

Dans la majorité des cas, les fentes labio-palatine sont isolées. Quand elles son liées à une autre pathologie, comme par exemple une trisomie 13 ou trisomie 18, des symptômes très lourds y sont associés ainsi qu’une espérance de vie relativement courte.

Cette déformation de la face concerne environ une naissance sur 700 ou 800, avec plus de filles concernées que de garçons.

Des symptômes esthétiques mais pas que…

Les symptômes sont en premier lieu « esthétiques » puisqu’on peut voir un orifice à l’endroit où il y a normalement la lèvre supérieure et l’arc de Cupidon.

L’absence de fermeture entraîne des difficultés d’alimentation pour le bébé. Un petit tour dans l’anatomie de cette partie, permet de voir que le rôle du palais est primordial puisqu’il sépare la bouche des fosses nasales. En son absence comme on peut le voir lors d’une fente labio-palatine, quand le bébé tète, le lait peut passer dans son nez.

Dans certains cas le bébé peut s’étouffer par une fausse route liée à cette malformation.

L’alimentation se fait alors avec des tétines spéciales et la pose d’un palais artificiel en résine. L’étape suivante est la correction de ce défaut par chirurgie réparatrice.

Les phonèmes et la prononciation des mots mettent en jeu la position de la langue contre le palais et notamment contre son voile, qui est la partie non osseuse. En l’absence de palais contre lequel la langue doit buter pour parler, des défauts d’élocution font surface.

Le positionnement des dents dépend également du positionnement de la bouche. C’est la raison pour laquelle le corps médical préfère programmer l’opération le plus tôt possible dans la mesure du possible afin de pallier les dysfonctionnements liés à la fente labio-palatine. 

Les traitements

Si la fente labio-palatine est déjà formée lors de la première échographie de datation (11 à 13 SA), elle peut ne pas être forcément visible selon la position du bébé à ce moment là. C’est au cours de la deuxième échographie, dite morphologique à environ 22 semaines d’aménorrhées et obligatoire en France, qu’elle est le plus souvent décelée.

Les parents sont alors convoqués pour une consultation anténatale. Les possibilités de reconstruction leur sont alors expliquées. Cette rencontre est d’autant plus importante quand il ne s’agit pas d’une forme familiale et qu’il faut une préparation psychologique à l’annonce et au suivi.

Opération de la fente labio-palatine

Une chirurgie réparatrice est proposée. Elle consiste à reconstituer la lèvre comme elle aurait être en l’absence de fente. Si la l’opération a l’air d’être impressionnante c’est parce que visuellement, l’orifice laissé par l’absence de fusion de la lèvre supérieur et du palais fait penser qu’il manque des tissus. Pourtant ce n’est pas du tout le cas. Tout est présent, il faut « simplement » les repositionner à leur emplacement d’origine.

Chirurgie de la fente labio-palatine sa cicatrisationPin

Si seule la lèvre est concernée, l’opération peut avoir lieu dans les trois premiers mois. Quand c’est plus complexe il faut attendre le sixième mois.

Dans les cas classiques, on assiste à trois étapes pour rétablir les fonctions de la lèvre et du palais :

  • La réparation de la lèvre
  • La réparation du palais avec le voile qui doit être repositionné
  • La réparation de la gencive avec une greffe osseuse (depuis la crête iliaque, dans la région pelvienne)

Une fois que cela a été fait, des séances d’orthophonie peuvent être nécessaires et exceptionnellement une opération supplémentaire au niveau du palais si les difficultés d’élocution n’ont pas disparu. Par ailleurs des suivis réguliers sont faits et une équipe pluridisciplinaire intervient, avec notamment des consultations en ORL pour l’audition et en orthodontie pour le positionnement des dents.

Sources et notes

Auteur : Ladane Azernour-Bonnefoy, Généticienne

  • Centre de compétences des fentes labio-palatines – Médipôle Garonne-Toulouse
  • Dictionnaire des termes de médecin – Garnier Delamare
  • Embryologie Humaine de Larsen – William J.Larsen – Gary C. Schoenwolf – Philip R. Brauer – Phulippa Francis-West – Steven B. Bleyl

Note de l’auteur : (L’usage du masculin a pour but d’alléger le texte sans préjudice pour la forme féminine.)

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