Edulcorants intenses : ces faux amis qui nous veulent du bien
On les trouve dans les produits « lights », mais aussi dans certains dentifrices ou médicaments : les édulcorants intenses ont le vent en poupe depuis une vingtaine d’années.
Pourtant, leurs bénéfices nutritionnels sont loin d’être à la hauteur de nos espérances : leur consommation n’entraînerait pas de bénéfices sur le contrôle du poids, la glycémie, ou le risque d’apparition d’un diabète de type 2… Pour les spécialistes en nutrition, c’est plutôt l’excès de sucre qu’il convient de limiter et ce, dès l’enfance.
De quoi s’agit-il?
Les édulcorants intenses sont des additifs alimentaires obtenus par synthèse chimique ou extraits de végétaux qui ont un pouvoir sucrant très élevé, plusieurs dizaines à plusieurs milliers de fois supérieur à celui du saccharose (le sucre blanc classique), sans apport calorique. Ils sont donc utilisés :
- pour réduire la consommation en sucre et l’apport énergétique dans le cadre par exemple d’un régime amaigrissant.
- chez les personnes diabétiques pour aider au contrôle de la glycémie.
D’autres édulcorants, dits de charge, comme les polyols présentent un pouvoir sucrant équivalent ou inférieur à celui du saccharose, avec un apport calorique réduit. C’est le cas notamment du sorbitol (E420) ou du xylitol (E967), utilisés fréquemment dans les confiseries ou les chewing-gums.
En France, les édulcorants intenses les plus utilisés sont l’aspartame, l’acésulfame K, le sucralose et les extraits de stévia, mais il en existe de nombreux autres.
Les différents édulcorants : aspartame, stévia, sucralose…
En France, les édulcorants intenses les plus utilisés sont l’aspartame, l’acésulfame K, le sucralose et les extraits de stévia, mais il en existe de nombreux autres.
L’aspartame (E951) :
C’est le plus connu et le plus décrié des édulcorants intenses. Découvert en 1965 aux Etats-Unis, l’aspartame est composé de deux acides aminés. Son pouvoir sucrant est 200 fois supérieur à celui du saccharose et sa valeur calorique quasiment nulle.
Il est utilisé dans certaines boissons, desserts, édulcorants de table ou chewing-gums.
Point important, son utilisation est contre-indiquée chez les personnes atteintes de phénylcétonurie.
L’acésulfame K (E950):
Son pouvoir sucrant est 200 fois plus élevé que le sucre pour une valeur calorique nulle.
Ce sel organique découvert en 1967 entre dans la composition d’un grand nombre de boissons, desserts, pâtisseries, sauces ou encore confiseries.
Il n’est pas métabolisé ni stocké dans l’organisme.
Le sucralose (E955):
C’est le seul édulcorant intense obtenu à partir du saccharose lui-même. Son pouvoir sucrant est 500 à 600 fois supérieur à celui du sucre et sa valeur calorique est nulle.
Comme ses homologues, le sucralose entre dans la composition de nombreuses boissons, desserts, produits laitiers ou édulcorants de table.
La stévia, le dernier-né des édulcorants naturels
Les glycosides de stéviol ou extraits de stévia (E960) sont autorisés en France depuis 2010. Ces derniers nés des édulcorants intenses ont un pouvoir sucrant 200 à 300 fois supérieur à celui du saccharose, pour un apport calorique nul.
Surfant sur la vague du bio, les industriels ne s’y sont pas trompés, développant largement des versions « naturelles » de leurs produits sucrés à base de cette plante originaire d’Amérique du sud.
Attention toutefois à ne pas confondre plante et molécules extraites : les édulcorants intenses issus de la stévia sont purifiés à plus de 95% ce qui, comme l’indique la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes, en fait un produit aussi éloigné de la plante d’origine que le saccharose l’est de la betterave !
Comment sont-ils réglementés ?
Comme tous les additifs alimentaires, les édulcorants intenses doivent, avant d’être mis sur le marché, être autorisés par la Commission européenne sur la base d’une évaluation des données toxicologiques disponibles.
A l’issue de cette évaluation, une Dose journalière admissible (DJA) est attribuée à chaque additif. Elle indique la quantité d’additif alimentaire qui peut être consommée quotidiennement, tout au long de la vie, sans poser de problèmes de santé. Pour l’aspartame, la DJA est ainsi fixée à 40mg/kg/j. En réalité, ces seuils sont quasiment impossibles à atteindre. Ainsi, une personne de 60kg devrait boire chaque jour 4 litres de boissons « light » à l’aspartame pour atteindre la DJA.
Quels avantages, quels risques pour la santé ?
Les édulcorants intenses présentent l’avantage de réduire l’apport calorique et de diminuer la consommation en sucre à court terme. Des bénéfices qui selon l’Anses (Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail) ne seraient pas garantis à long terme. Certaines études suggéreraient même que l’utilisation des édulcorants intenses est paradoxalement associée à un gain de poids.
Plus préoccupant, l’Anses suggère que la consommation d’édulcorants intenses en substitution du sucre chez les personnes diabétiques n’apporte pas de bénéfices sur le contrôle de la glycémie. Cela ne permettrait pas non plus de prévenir l’apparition d’un diabète de type 2.
Point positif en revanche, les édulcorants ne sont pas cariogènes, c’est-à-dire qu’ils ne provoquent pas de carie dentaire, d’où leur intérêt dans certains chewing-gums dits « sans sucre » qui sont même conseillés après le repas lorsqu’on ne peut pas se brosser les dents.
Concernant les risques liés à la consommation des édulcorants intenses, tels que l’habituation au goût sucré, la survenue d’un diabète de type 2 ou de cancers, les autorités de santé sont rassurantes, mais soulignent que les données actuelles ne permettent pas d’écarter complètement certains risques en cas de consommation régulière et prolongée.
Réduire sa consommation en sucre
Au final, l’Anses estime qu’il vaut mieux encourager une réduction globale du goût sucré dans l’alimentation, en particulier chez les enfants. Elle rappelle à ce titre que les boissons sucrées « lights » sont le principal vecteur des édulcorants intenses et qu’elles ne doivent pas se substituer à l’eau.
Sources et notes
Auteur : Charlotte Delloye